Chroniques d’histoire de la Grande Loge Nationale Française

Francis Delon est un grand spécialiste de l’histoire maçonnique. Sa thèse fut publiée chez le même éditeur sous le titre Histoire de la Grande Loge Nationale Indépendante et Régulière pour la France et les Colonies françaises 1899-1940.

Grand archiviste de la G.L.N.F., Grande Loge Nationale Française, il s’intéresse plus particulièrement dans ce livre, qui prolonge celui précédemment cité, aux années 1960-1970, années qui virent l’essor du développement de cette obédience sur la scène maçonnique française et européenne, jusqu’aux années 1980.

Comment est-on passé d’une obédience rassemblant 2000 frères dont seulement 350 français en 1959, à la deuxième puissance maçonnique française ?

Francis Delon présente les événements marquants, les acteurs de ce rayonnement sans écarter les crises, les difficultés, les choix parfois difficiles.

L’ouvrage est composé en deux parties, l’une consacrée aux faits, l’autre aux hommes.

Dans la première partie, partant de la scission écossaise de 1964-1965, qui vit arriver à la GLNF un millier de membres de la Grande Loge de France, contrariés par le rapprochement avec le Grand Orient de France, il détaille le processus d’intégration de ces frères qui bouleversa les équilibres au sein de l’obédience notamment par la généralisation du Rite Ecossais Ancien et Accepté au sein de la GLNF, avec, au centre des discussions, la question des rituels en usage.

Un sous-chapitre aborde la naissance et la fonction de la loge de recherches Villard de Honnecourt, aujourd’hui bien connue par ses travaux de référence. Un autre, tout à fait nécessaire évoque les sources, l’élaboration, la diffusion et la réception de La Voie substituée de Jean Baylot, ouvrage incontournable encore aujourd’hui pour comprendre le monde maçonnique français. Il détaille cette réception, dans la presse, dans les revues, dans l’univers académique, dans le milieu maçonnique et enfin dans le monde profane.

Dans la longue partie consacrée aux hommes, est présentée la correspondance Marsaudon-Van Hecke (1965-1966) qui éclaire les événements de cette période.  Francis Delon détaille également les rapports avec l’Eglise catholique à travers la personnalité du père Michel Riquet qui œuvra pour un dialogue entre l’Ordre maçonnique et l’Eglise romaine. Marius Lepage habite également ces pages, lui qui fut un grand maçonnologue du siècle dernier, tout comme Jean Bossu (1911-1985), lui aussi historien important de la Franc-maçonnerie. Enfin, Francis Delon nous parle de Jean Oluf Heineman (1919-2003), un nom moins familier, qu’il présente comme « un authentique chevalier des temps modernes ».

L’ouvrage, étayé et sourcé comme il se doit, se lit avec plaisir tant l’histoire maçonnique est avant tout l’histoire des êtres humains, avec leurs forces, leurs défaillances, leurs certitudes et leurs doutes. 

Dans une postface, Thierry Zarcone résume tout l’enjeu de ce livre :

« Les faits et les événements qui marquent la G.L.N.F. après la seconde guerre mondiale s’inscrivent dans une quête identitaire aux affirmations de plus en plus fermes et éprouvées, et ce en dépit d’un milieu maçonnique hostile, contrôlé depuis toujours par des obédiences (GODF, GLDF) en rupture avec la Maçonnerie anglo-saxonne et ses valeurs. Cette quête d’identité est rendue possible par une clarification historique du fait maçonnique dans l’histoire française et une légitimation du retour de la régularité dans un pays où celle-ci a été abandonnée, d’une manière indiscutable en 1877, mais, de fait, dès la première moitié du XIXe siècle. Par retour de la régularité, il faut entendre la réactivation d’un ensemble de principes et de pratiques maçonniques qui sont ceux sur lesquels a été fondée la Maçonnerie anglo-saxonne à partir de 1717-1723 ; c’est ce que l’on pourrait appeler la tradition, ou le sacré que les Francs-maçons opposent généralement au reste, c’est-à-dire au profane. »

Source : La Lettre du Crocodile

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