Francesc Eiximenis (1330 – 1409) est un franciscain catalan qui laissa une œuvre considérable et influente. La pièce maîtresse de cette œuvre est un ensemble de treize livres, Lo Crestià, resté inachevé.
Son Llibre dels àngels connut un vrai succès et fut largement traduite et publiée aux XVème et XVI XVIème siècles. C’est un traité d’angéologie très développé auquel se mêlent des considérations plus politiques. Francesc Eiximenis participe au développement du culte des anges protecteurs des cités.
Il va ainsi inventer le culte de l’Ange custode de Valence. C’est à partir de soixante ans qu’il laisse de côté une vie plutôt aventureuse et politique pour renouer avec la religiosité et la contemplation. Le Livre des Anges et la Vie du Christ, ouvrage considéré comme exceptionnel, malheureusement indisponible en français, sont le fruit de cette période d’intimité spirituelle. Le Livre des Anges s’appuie sur plusieurs sources dont la Hiérarchie céleste de saint Denys l’Aéropagite et le De divinis nomiunibus du pseudo-Denys mais cet érudit a étudié les œuvres puissantes de nombreux auteurs de saint Augustin à Origène en passant par Aristote.
Cependant, son écriture est très vivante par l’intégration d’anecdotes, témoignages, légendes, miracles. A la fois garant d’une angéologie classique et novateur dans son expression, son travail, se trouve à la croisée de la tradition populaire et de l’érudition sans qu’il défende les thèses de telle ou telle école.
Le Saint Michel Archange se présente comme le cinquième traité du Livre des Anges. Outre certains passages de la Bible, comme la révélation faite au prophète Daniel, le glissement de certains mythèmes des traditions non chrétiennes vers l’action de saint Michel vont favoriser le développement du culte de saint Michel qui au fil des siècles va s’étendre et se renforcer avec des ancrages particulièrement puissants comme la création du Mont saint Michel au VIIIème siècle ou la fondation au XIIème siècle par Alphonse 1er de Portugal de l’Ordre des chevaliers de l’Aile de saint Michel pour célébrer la victoire d’Alcobaça en 1171 qui fait écho à une autre victoire du roi : Alphonse 1er fut le fondateur du royaume de Portugal par la célèbre bataille d’Ourique en 1139.
Cependant, Eiximenis traite surtout des fonctions de l’archange dans son traité : médiateur et conseiller des gouvernants, adversaire permanent de Lucifer, maître des miracles, facilitateur de la compréhension du dessein divin, artisan de sa création, organisateur de la fin du monde, etc.
Nous remarquerons le chapitre consacré aux prophéties concernant les royaumes d’Europe qui s’inscrivent dans l’attention générale que portent les franciscains aux prophéties, particulièrement dans la péninsule ibérique. Plusieurs chapitres de fin d’ouvrage traitent de la prière à saint Michel et de son efficacité. Comme le note Patrick Gifreu dans sa belle et riche présentation de l’ouvrage, « en définitive, il s’agit de l’ange protecteur de chaque âme sur lequel le XVème siècle s’est interrogé avec une curiosité particulière. ».
Cette édition, particulièrement soignée, d’un texte important du grand auteur que fut et demeure Francesc Eiximenis a été publiée avec l’appui de l’Institut Ramon Llull de Barcelone.