Cette réédition est judicieuse. Ce livre est en effet l'un des meilleurs pour appréhender le remarquable et très incompris système social des hindous et la manière dont cette vie sociale s'inscrit dans la vie des dieux.
La société hindoue est multiraciale et multiculturelle. Même si les applications des principes fondamentaux qui régissent la vie sociale hindoue ne sont pas parfaites, elles apparaissent comme une réponse possible à des problèmes que la civilisation moderne occidentale est incapable de régler.
Voici comment Alain Daniélou introduit cet ouvrage de référence :
"La vie de l'homme, individuelle ou collective, apparaît, selon la conception hindoue, régie sous toutes ses formes par le nombre 4 et présente donc toujours quatre aspects. Il y a d'abord les quatre périodes d'évolution de tous les êtres; enfance, jeunesse, maturité, vieillesse. Durant chacune de ces périodes prédomine l'un des quatre buts de la vie, qui sont la vertu, le plaisir, le succès et la libération. Par vertu (dharma) on entend l'art du comportement conforme aux données propres à chaque être. La vertu est donc l'observance d'un code de conduite déterminé pour chacun par sa nature et sa naissance. Les vertus d'un roi ne sont pas les mêmes que celles d'un artisan et leur réalisation dépend dans une large mesure de l'éducation de l'enfant. Ensuite viennent les plaisirs des sens (kâma) dont chacun doit réaliser la plénitude dans la jeunesse. Durant l'âge mur chacun doit se réaliser sur le plan social, obtenir le succès, les biens, la richesse, le pouvoir qui constituent le troisième but (artha). Le quatrième but, la réalisation spirituelle, liée au renoncement et aboutissant à la libération (moksha), doit prédominer dans le quatrième âge, la vieillesse. Toutefois durant aucun des âges de la vie on ne peut réaliser pleinement l'un de ces buts si l'on néglige les autres.
Un lien étroit existe entre le plaisir et la libération d'une part et la vertu et le succès de l'autre. L'amour conduit à la sagesse et la vertu au succès matériel. Les premiers sont antisociaux, libérateurs, déraisonnables, les deuxièmes nous attachent au monde et à la société des hommes."