Le sentiment de l’absurde naît souvent de la confrontation répétée avec la médiocrité humaine. Henri Damay propose au lecteur d’explorer les aspects les plus sombres de la psyché humaine comme des indicateurs de transcendance. Il y a quelque chose d’une philosophie du renversement dans ce livre dont le point de départ, l’humain tel qu’il est, est ajusté à sa finalité paradoxale, l’amour universel. L’être humain est enfermé dans des schémas destructeurs et débilitants. Henri Damay parle de « stupidité et ignorance ».
Sans une observation attentive de ce qui se présente, en nous et par nous, ces schémas mortifères ne peuvent être évités. Les automatismes de la pensée invitent à découvrir une autre approche.
Henri Damay évoque le silence qui s’installe par une désidentification à la pensée conceptuelle. Observer la stupidité en action, d’instant en instant, peut se révéler salutaire, une prise de conscience de l’éveil, notre état naturel, déjà là derrière l’apparence. Les antinomies propres à la dualité se réduisent d’elles-mêmes dans une conscience absolument inclusive. Le chemin contre la séparation et le fractionnement passe non par un « faire » mais par l’observation de ce qui obscurcit la vision, une écoute libérant la vacuité silencieuse, notre véritable nature. Le jeu des identifications laisse place alors à un océan de tranquillité.
L’évidence de l’être s’impose sans les contingences de l’humain : « Au cours de l’investigation que chacun peut faire pour retrouver une hypothétique liberté, une compréhension du sens de la vie, une stratégie idéologique ou religieuse pour être enfin heureux, il y a le risque que se présentent des périodes souvent pénibles.
Les désillusions, les efforts sans résultats, les croyances décevantes représentent les péripéties existentielles que peu sont en mesure d’éviter. Le fond du problème réside dans le fait que l’instrument impliqué dans de tels questionnements n’est pas en mesure de pouvoir les résoudre du fait que la pensée n’est pas l’outil adéquat.
Si nous escomptons avoir des réponses qui satisferons le mental nous serons comme le chien qui essaie d’attraper sa queue. Les enseignements les plus profonds, les clarifications les plus pertinentes, les conceptions les plus sublimes ont certainement leurs rôles à jouer jusqu’au moment où tout cela apparaît comme dérisoire.
La vérité ultime ne se laisse pas penser, ce qui sous-entend que l’humain n’aura jamais aucune réponse autre que celle émanant des concepts qu’il élabore et qui ne sont que des mots qui s’envolent dans le vent. Puisque rien n’est à attendre des pensées et du devenir, que reste-t-il ?
Un vide sans forme et sans distinction. Une fois le besoin de comprendre évanoui, nous sommes cela. »