Saluons la renaissance de ce livre mythique, indispensable à toute bibliothèque hermétiste, grâce aux Editions Albin Michel qui ont enfin sorti l’ouvrage de l’embrouillamini judiciaire et éditorial dans lequel il était plongé depuis des années.
Pour un prix cette fois modeste, vous pouvez de nouveau vous procurer l’une des expressions, toujours difficiles à identifier, de l’Estoile Internelle, une société secrète hermétiste, chrétienne voire catholique, qui perdure jusqu’à nos jours, dépositrice d’une alchimie interne.
Louis Charbonneau Lassay (1871-1946) proche de René Guénon sans être guénonien, collabora à de nombreuses revues hermétistes, occultistes, spiritualistes dont Atlantis, Le Voile d’Isis, les Etudes Traditionnelles, Le Rayonnement intellectuel et surtout Regnabit.
Son Bestiaire du Christ faisait partie d’un vaste projet en quatre volets qui devait ainsi comporter un Vulnéraire du Christ, un Floraire du Christ, un Lapidaire du Christ.
Charbonneau-Lassay nous fait découvrir les mécanismes et les fulgurances de la langue figurée des représentations zoologiques. Ce dictionnaire est une contribution majeure à la connaissance de la langue utilisée dans la construction des cathédrales mais aussi à la lecture des textes alchimiques.
Voici deux extraits de son avant-propos qui démontrent à la fois l’intérêt de la démarche et sa rigueur :
« Dans cet ouvrage, j’ai essayé de présenter les significations exactes des figures emblématiques qui, au cours des siècles chrétiens, et dans des milieux très divers, ont été adoptées pour représenter mystérieusement la personne de Jésus-Christ sous ses divers aspects. Parmi ces idéogrammes, certains auraient pu fournir la matière d’un ouvrage complet. J’ai dû résumer et m’en tenir à l’essentiel de leur passé préchrétien et chrétien, car très souvent le premier éclaire le second et donne l’origine première des significations christiques de l’emblème.
Ce n’est qu’encouragé par de hautes autorités intellectuelles, catholiques et autres, que j’ai osé entreprendre d’apporter mon humble contribution pour aider à répandre une connaissance plus grande et plus précise, une compréhension plus sûre de l’emblématique consacrée par nos pères au rédempteur du monde ; car il faut bien avouer que les emblèmes qui le concernent sont aujourd’hui très souvent employés sans tout le discernement désirable par des artistes de tous genres, d’ailleurs excellents et que des écrivains, et non des moindres, en ont parlé parfois avec une regrettable méconnaissance des véritables significations dont la pensée chrétienne des anciens siècles les a dotés. (…)
Au cours de ces pages, je n’ai point hésité à m’appuyer parfois sur l’opinion de savants et d’auteurs notables, dont certains ouvrages ne sont pas toujours dans la stricte orthodoxie catholique ou qui même s’en écartent totalement : c’est que lorsqu’ils ont traité d’histoire, d’archéologie, d’orientalisme, d’hermétisme ou de traditionnisme et qu’ils ont dit que tel emblème, en des régions et des temps déterminés, fut consacré au Christ ou simplement au Verbe divin, ou qu’il fut doté d’une toute autre signification, il faut les en croire en raison de leurs grandes connaissances en ces domaines : ce qui n’implique nullement une adhésion quelconque à leurs autres idées. »
L’ouvrage est ambitieux. Le projet est colossal, inachevé bien sûr mais le Bestiaire constitue à lui tout seul une somme considérable que l’hermétiste consulte bien souvent.