La Tour Saint-Jacques, qui fut si chère à Robert Amadou, est au cœur de ce roman compagnonnique. L’auteur Jean-François Blondel, spécialiste du Compagnonnage, nous entraîne dans un polar médiéval palpitant tout en restituant avec justesse, la richesse et la complexité du monde des bâtisseurs au XIVème siècle. En appendice, l’auteur nous rappelle l’histoire de cette tour hautement symbolique :
« Dernier vestige de l’église Saint Jacques de la Boucherie, emportée par la tourmente révolutionnaire en avril 1797, la tour a dû sa survie grâce à un architecte parisien, qui fit préciser, dans le procès verbal de vente du terrain de l’église, que celle-ci n’était pas comprise dans le prix de vente. Elle était sauvée de la destruction. Au début du XIXème siècle, elle devint la propriété d’un fabricant de plombs de chasse nommé Dubois. Sur la plate-forme du haut, le métal était fondu dans une chaudière, puis on le faisait couler dans le vide par des tuyaux de fonte et les gouttelettes en fusion s’arrondissaient pendant la chute. A peine avait-elle échappé à la pelle des démolisseurs, qu’elle dût subir deux incendies en 1819 et 1823. Elle retournera à la ville de Paris en 1833. (…)
Ainsi la tour Saint-Jacques, après avoir été sauvée une première fois de la furie révolutionnaire, après l’avoir été une seconde fois d’un incendie qui faillit l’anéantir, et avoir été restaurée par l’architecte Balu au XIXème siècle, elle sera de nouveau sauvée de la ruine en 2006 par des travaux qui doivent se poursuivre jusqu’en 2009. Après être devenue un moment la « tour invisible », qui se cache derrière ses échafaudages et ses filets de protection, elle apparaît maintenant plus radieuse que jamais. Telle le phœnix, la tour Saint Jacques renaît périodiquement de ces cendres. Elle a bien mérité le qualificatif de Demeure Philosophale ! »
C’est donc un privilège de pouvoir la contempler aujourd’hui, belle et fière au cœur de Paris et de décrypter les messages qu’elle dissimule.
Lors de l’inauguration de la tour en 1523, après 14 ans de travaux, le maître d’œuvre a un comportement étrange. Avant de disparaître, il aurait dissimulé quelque chose dans la tour, quelque secret, venu d’une confrérie mystérieuse, les Frères de la Rose. C’est là le centre de l’intrigue qui se déploie autour de la tour mais aussi d’autres lieux de tradition comme Notre Dame de Paris ou « la tour de beurre » à Rouen.
Jehan, le principal protagoniste, entre en possession d’un mystérieux grimoire :
« J’en connaissais l’existence, lui dit un interlocuteur choisi, mais je n’avais jamais pu le contempler et croyais qu’il avait disparu. Je peux te montrer celui que je possède : il détaille lui-aussi les curieux médaillons qui ornent les piédroits du Portail des Libraires de la cathédrale, et en donne une bonne interprétation, mais il se limite à cette cathédrale. Mais celle-ci a une portée beaucoup plus générale et est un véritable traité de la Pierre des Sages. Ce Livre Muet décrit les étapes de l’œuvre et la construction de l’œuf philosophique ainsi que les moyens pour parvenir à la pierre au rouge. Il donne aussi de précieux renseignements sur les bas-reliefs gravés sur les portails de certains édifices religieux et les cathédrales en particulier. (…) Mais n’oublie pas que certains n’hésiteraient pas à te faire disparaître pour se le procurer !... »
Le roman met en perspective la tradition des bâtisseurs et l’alchimie. L’auteur montre comment des groupes occultes souvent éphémères font serpenter un savoir caché qui perdure ainsi, échappant au vulgaire. Il dit, une fois encore, l’importance et l’actualité du savoir et de la sagesse du Compagnonnage.