Méditation de l’Eternel Féminin et manifeste pour une nouvelle alliance entre la femme et l’homme, partant entre la femme et l’Eglise, cette apostrophe élégante mais puissante au Pape est aussi une célébration du féminin, en toutes ses dimensions, à travers de grandes figures féminines comme la Bien-Aimée du Cantique des cantiques, Marie de Magdala, ou encore la femme « revêtue de soleil » de l’Apocalypse, mais également à travers les innombrables gestes du quotidien féminin qui sacralisent la banalité apparente de la vie.

Jacqueline Kelen dessine le portrait d’une aristocratie féminine, d’une noblesse de cœur qui lie le ciel et la terre : prophétesses, prêtresses, muses ou artistes, toutes porteuses d’un sacerdoce d’amour, guides subtiles et invisibles de ceux qui savent faire battre leur cœur à l’unisson du leur. Médiatrices qui délient, femmes qui libèrent.
« Beauté, Amour, Liberté, telle est la triple illumination que la femme, en se verticalisant, en se perfectionnant sans cesse, peut, avec la grâce de Dieu, prodiguer à notre monde. »
Interpellant avec douceur ce Pape, sourd presque par tradition aux voix féminines, elle dit la voie de la Beauté :
« J’en viens cher Benoît XVI, à la mission propre aux « dames, qui ne sont pas seulement des femmes », à celles qui répondent en ce monde au Féminin Transcendant. Une femme accomplie a à manifester la Lumière spirituelle d’une triple façon, par une fonction royale, sacerdotale et prophétique. J’entrevois ainsi la mission sacrée dévolue à la Femme :
Son Royaume est la Beauté.
Son sacerdoce est l’Amour.
Son prophétisme est Liberté.
Ayant pour Royaume la Beauté et l’Amour pour Sacerdoce, la Femme ne se préoccupe pas en premier des structures et des dogmes, mais elle est attentive à la qualité des gestes, des présences, des moindres choses. Pour elle, la beauté ne réside pas dans le pompeux ni le monumental, mais transparaît dans la simplicité, dans la justesse de l’accord, dans ce qui résonne entre monde humain et monde céleste. Ainsi, la magnificence divine peut se révéler au cœur d’une fleur ou dans le regard de bonté d’un animal. (…)
Une femme accomplie est aussi prêtresse d’amour, Socrate le savait qui, dans le célèbre Banquet, s’efface pour laisser parler Diotime sur ce profond sujet. Eveillant le printemps dans le cœur de l’homme, elle lui donne le goût d’aimer et le garde de tomber dans la dureté, la froideur ou la barbarie. Telle la Dame courtoise – à laquelle un Bernard de Clairvaux et un François d’Assise ont en leur temps rendu hommage -, elle ravive le courage et l’ardeur, le lyrisme et l’honneur, et son amour invite l’homme à la grandeur, à un perfectionnement incessant, et le revêt de noblesse autant que de tendresse.
En sa fonction sacerdotale, la Femme a pour mission de témoigner de la puissance infinie, éternelle, de l’Amour qui œuvre en tout. Elle rappelle aussi que sans la Mystique la Théologie se refroidit jusqu’à devenir un système de pensée, un corpus doctrinal ; que l’Intellect est pauvre et limité, qu’il retentit comme une cymbale solitaire s’il ne s’allie pas à l’Amour ; et qu’il n’est de savoir véritable sans l’assentiment du cœur. »
A aucun moment, Jacqueline Kelen n’oppose, comme le fait l’Eglise, l’homme à la femme. Elle ne cesse d’éclairer cette alliance première et ultime, notre propre nature, déniée par une culture, religieuse ou non, profondément aliénante.
« Telles deux « colonnes de feu », côte à côte ou face à face, la Femme offre le visage divin de la Beauté, de l’Amour, et de la Liberté, et l’Homme représente la Force, la Justice et la Vérité de Dieu.
Ces charismes différents sont appelés à s’unir pour refléter l’Alliance entre Dieu et l’humanité. (…)
Je poursuis : le triple charisme de l’Homme instaure la Paix ; le triple charisme de la Femme fait advenir la Joie. Paix et Joie, tel est le double couronnement d’un monde réunifié, entier, qui annonce le Règne de Dieu.
Il ne s’agit pas là d’un idéal inaccessible : car, selon la Genèse, l’homme et la femme ont été créés à Son image et à Sa ressemblance. Ils ont donc à se hisser jusqu’à leur Créateur, puisqu’ils sont appelés à la divinisation. Jésus a déclaré sans ambages : « Soyez parfaits, comme votre père est parfait. » Cela ouvre de vastes perspectives. Et des voies de réalisation diverses. Car il y a une perfection d’amour et de dépouillement comme il y a une perfection de courage et de grandeur. »
Loin d’opposer Agapê à Eros, Jacqueline Kelen célèbre le désir, l’élan amoureux, « grand oublié de la théologie catholique ». « Or, dit-elle, il ne paraît guère possible d’accéder à l’agapê (amour divin) sans connaître l’éros (désir, élan amoureux). » Refusant d’être voilée, déshabillée ou masculinisée, elle appelle à une nuptialité sacrée qui ne rejette pas le corps mais qui en fait un calice pour accueillir le feu divin. La femme éveilleuse est dangereuse puisqu’elle libère en « aimant absolument ».
Certains connaissent la Voie de l’Âne, Tradition s’il en est. C’est comme La petite ânesse que se présente Jacqueline Kelen devant le Pape :
« C’est pourquoi je m’adresse aussi à vous, cher Benoît XVI. Pour vous rappeler qu’une ânesse est, comme une femme, espiègle et obstinée, précieuse et peu considérée ; qu’elle a des choses à dire qu’on n’entend pas toujours ; et qu’elle peut pleurer, comme une femme, de chagrin, de douleur mais aussi de beauté et d’amour. »
Ecrit sous le signe magique de Myriam, ce livre, s’il n’est point entendu par le Pape, chantera tout du moins à vos oreilles, aux oreilles du cœur, un hymne salvateur à la liberté, à l’Esprit.

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