La réception de René Guénon par Henry Corbin : « une question assez délicate »
Nous sommes en 1926 et Henry Corbin a vingt-trois ans. Il rêve de quitter les bancs de la Sorbonne pour partir en Inde, confronter ainsi son bagage théorique en philosophie et histoire des religions aux pratiques corporelles d’éveil et de réalisation spirituelle indiennes. A cette même époque, tous ces étudiants dévoraient le périodique « Les Appels de l’Orient » (revue soupçonnée par l’Action Française de « vouloir dissoudre l’intelligence latine »…) et un certain René Guénon était alors au firmament de sa notoriété. « Orient et Occident » était paru deux ans avant et « Introduction générale à l'étude des doctrines hindoues », cinq ans auparavant.
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René Guénon était alors reconnu comme un grand orientaliste, en dehors des universités.
Pour Corbin, la découverte de cette métaphysique universelle fut un choc salutaire.
Xavier Accart s’est spécialisé dans la réception de l’œuvre de René Guénon (thèse de doctorat, EPHE). A partir d’un courrier échangé en 1976 entre Henry Corbin et un doctorant canadien l’interrogeant sur l’influence de l’œuvre de René Guénon sur ses propres travaux (Monde Imaginal, phénoménologie, mystique shi’ite), Corbin sembla troublé et répondit à l’étudiant : « c’est une question assez délicate… ».
Cette remarque constitue le fil d’Ariane de Xavier Accart.
1926-1976 : cinquante années d’immixtion de Corbin dans l’œuvre de Guénon. Partant d’un âge d’or, juvénile et idéalisé, à des divergences de plus en plus saillantes.
De la place de la philosophie dans la spiritualité, de la prise en compte des émotions, des nuances entre « mystique » et « initiation », de l’unité transcendantale de l’Etre contre l’unité illusoire de l’étant : Xavier Accart nous emmène aux contreforts de deux pics de la pensée : herméneutique et métaphysique.
Jusqu’où se font-elles écho ?
Un exposé enregistré lors des XVIème Journées Henry Corbin que nous remercions.