La nouvelle édition, largement augmentée, du Testament maçonnique de Denis Labouré est bienvenue à un moment de grande interrogation au sein des rites maçonniques égyptiens sur la nature et la finalité du processus initiatique qu’ils peuvent proposer alors que le morcellement sans précédent de ces rites exige une recomposition.
Or, Denis Labouré clarifie grandement les enjeux en écartant certaines erreurs ou confusions, voire puérilités, qui nuisent à la manifestation de l’œuvre initiatique. Il aborde ainsi la question de la filiation et de son hypertrophie, de la reconnaissance, toujours relative et contextuée, ou encore de la fonction des vieux filons hermétistes.
Car, c’est bien d’hermétisme dont il est question. L’hermétisme reste, bon an mal an, le cœur du travail dans les rites maçonniques égyptiens même si, le plus souvent, ce travail ne dépasse pas le stade de l’intention. Parmi les textes divers que Denis Labouré a rassemblé pour ce livre, le Programme de travail appliqué par une loge de rite égyptien propose une pédagogie active afin d’accompagner au mieux ceux qui s’engagent dans un chemin qui ne manque pas d’embûches, d’impasses et de paradoxes.
Cette pédagogie fut mise en œuvre de manière expérimentale dans le cadre du Cercle Arturo Reghini dont sont publiées ici les premières Lettres d’instruction.
« Pour atteindre son objectif, le maître du rite égyptien recourt à des procédés qui ont pour but de rendre spirituel ce qui est corporel et matériel. De même qu’en alchimie métallique, le plomb se transforme en or. Voilà ce que visent les alchimistes. Voilà ce qu’envisage la théologie de la divinisation. Voilà ce que transmet Cagliostro dans ses catéchismes maçonniques. »
Cagliostro que, dans les pas de Robert Amadou, contribue à réhabiliter Serge Caillet dans sa préface, est l’une des références majeures des rites égyptiens que Denis Labouré a longuement étudié et pratiqué. L’ombre lumineuse du Grand Cophte habite ces pages et ce n’est certes pas par hasard que l’ouvrage inclut les magnifiques tableaux de loge en couleur du rite de Cagliostro. Il s’agit de six tableaux pour le rite masculin de la Haute Maçonnerie Egyptienne et trois pour le rite féminin. Ces aquarelles puisent dans la mythologie pour établir une constellation de mythèmes susceptibles de véhiculer la tradition napolitaine dont Cagliostro fut un vulgarisateur.
Ce testament est très exactement « une prise à témoin » selon l’étymologie, qui vient attester de la réalité d’un processus initiatique possible au sein des rites maçonniques égyptiens, possible mais qui ne va pas de soi. Il exige vigilance, engagement, simplicité née du regard non-duel et l’acquisition de ce que Denis Labouré présente sous la forme de quatre langages correspondant à la recherche, la découverte, la démonstration et enfin, l’être.
Source: La Lettre du Crocodile