Nous ne pouvons que conseiller cet ouvrage à tous ceux qui veulent comprendre le rite de la messe. Si ce rite existait antérieurement a christianisme dans divers courants traditionnels, il a pris une dimension particulière depuis le repas de la Pâque par lequel le rabbi Jésus de Nazareth lui a donné un nouveau sens. Denis Labouré note qu’en 1500 ans, seuls 26 mots ont été modifiés ou ajoutés au canon romain, le cœur de la messe, fait suffisamment remarquable pour alerter sur l’importance de ce qui constitue une théurgie à part entière destinée à élever jusqu’au Divin.
Après avoir dit les errements de l’Eglise de Rome en 1969/1970 qui rompit avec la tradition, Denis Labouré développe avec clarté le sens profond du rite, sa fonction, son efficacité sur laquelle insistait, entre autres, l’abbé Julio, et son ésotérisme. La compréhension de la « divine liturgie » exige l’étude et l’expérience de la communauté, du sacrifice, du principe de substitution, des clés opératives du rite. Approcher le sens de chaque geste et de chaque parole permet de passer de la simple commémoration du dernier repas du Christ au rite dans sa dimension supra-humaine.
« Comment se réalise le saut chronologique qui nous fait passer, de l’instant où nous nous trouvons, à cet instant primordial de l’événement originel ? Comment à chaque messe, le sacrifice du Christ peut-il être efficace ? Et comment rejoignons-nous sa personne dans l’acte de son sacrifice réalisé une fois, à un moment précis de l’histoire ? (…)
Ainsi, la messe a son prototype dans le sacrifice céleste de l’Agneau décrit par l’Apocalypse. Il est vain d’objecter que cette façon de concevoir les choses n’est qu’une projection de la liturgie terrestre, qu’on imagine se dérouler dans le ciel. C’est l’inverse qui est vrai : la liturgie visible est la réfraction symbolique, dans le plan sur lequel l’homme se meut pendant l’existence terrestre, de la réalité invisible d’en-haut.
Les différentes opérations divines et les différents événements se manifestent en mode successif, temporel. Mais tout est déjà fait, tout est déjà arrivé de toute éternité. Tout se passe comme si les événements, amassés en un seul point, étaient ensuite déployés, projetés, sur un cercle à la circonférence mobile, qui serait le temps. Dieu possède son Être et son existence dans l’insécable présent, et tous ses actes sont posés simultanément. »
Célébration d’une liturgie céleste, le rite de la messe en est son actualisation ici et maintenant.
Dans une seconde partie, Denis Labouré recourt à C.W. Leadbeater (1854 – 1934), théosophe, auteur d’un remarquable ouvrage, La science des sacrements qui rend compte du rite de la messe d’un point de vue « énergétique ». Le regard apporté par Leadbeater, qui peut sembler inhabituel, permet de mieux saisir l’opérativité de chaque moment du rite, que cela soit la musique et le chant, l’encensement, l’offertoire, la consécration, la réalité de la transsubstantiation, la communion, etc.
Ce rite de déification du pain et du vin par le souffle divin, qui permet de rompre avec la temporalité, et donc avec la génération, pour s’inscrire dans une unique verticalité, vise à libérer de tout attachement pour rendre réellement « vivant ».
Cet ouvrage, précis et rigoureux, offre une approche opérative, technique, de la messe et de la fonction eucharistique tout en préservant sa dimension mystérique sans laquelle l’Esprit ne saurait « agir ».