Ce livre est un petit traité sur l’expérience de l’éveil, sur le vécu au quotidien de cet état appelé « éveil ».
Présenté sous forme d’entretiens, c’est un livre adapté à une culture occidentale qui a besoin de rationaliser et de conceptualiser, deux actions de la pensée qui sont justement étrangère à l’éveil.
S’appuyant à la fois sur le judaïsme, le christianisme et l’hindouisme, Yvan Amar démystifie, éclaire, invite surtout à la profondeur, conscient des limites du langage, conscient de ses possibilités dès lors que nous entrons en poésie :« Vous évoquiez le réel et le fait que peu de personnes le désirent vraiment. Y a-t-il des mots pour parler du réel ?
Non. De même qu’on ne peut désirer le réel parce que le réel seul désire. Le début du Tao te king dit que celui qui sait ne parle pas et que celui qui parle du réel ne parle pas de la réalité : c’est juste mais incomplet. On ne peut pas parler du réel, soit, mais le réel, lui, peut parler. En fait, seul le réel parle. Celui qui est éveillé à cette nature-là, quoi qu’il dise, ne parle pas du réel, c’est le réel qui parle en lui. Lui peut parler de la pluie ou du beau temps, de la façon de faire pousser les carottes, ses mots n’enfermeront jamais celui qui les écoute parce qu’il n’essaye pas de parler de quelque chose : c’est cette chose-là qui est en train de parler de lui, ce sont des mots ouverts. Il est naturellement poète parce que ses mots louent, expriment et glorifient. »
Le chapitre consacré à l’intégration de l’éveil est particulièrement important. Yvan Amar renvoie à l’intelligence et à la sagesse du corps.
« La discipline spirituelle a le pouvoir de nous faire accéder à une autre qualité de conscience, mais aussi celui de nous extraire de notre condition ordinaire par la structuration de notre conscience. Au cours de l’évolution spirituelle, on se défocalise de cette expérience transcendante. Le centre d’intérêt se porte sur ce véhicule, ce réceptacle qu’est le corps, afin de lui permettre de l’accueillir et de l’intégrer par l’ascèse. L’étape la plus passionnante arrive lorsque ce travail ne vise plus à provoquer une expérience, ni même à se structurer pour l’intégrer : on prend alors conscience qu’il est sa propre finalité. Au cours des allers et des retours, notre véhicule s’est transformé. Dès lors, une intégration réelle se produit, mais elle n’est le résultat d’aucun effort : elle est la nature même de l’effort qui tend à s’en saisir. »
texte: Le Crocodile, https://lettreducrocodile.over-blog.net/