Le chamanisme, entre la hutte et l’hôpital psychiatrique
Qui ne s’est jamais placé dos à un arbre, en pleine forêt, les paumes des mains ouvertes sur son tronc, les yeux fermés, sans ressentir un indicible trouble, le sentiment qu’une communion "hors-norme" s’établissait… ? Sentimentalité excessive ? Autosuggestion ? Névrose ? "De nos jours, dans notre façon de remettre en cause l’idéologie dominante, le chamanismereçoit de très nombreuses faveurs" nous-dit Michel Cazenave. "Ici et là, en effet, on voit fleurir des week-ends où en l’espace de deux jours on apprend à devenir chamane… ".
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Est-ce bien sérieux ? Que transporte le chamanisme au-delà des phantasmes que nous pouvons nourrir ?
Pour répondre à cette question, nous avons réunit Djohar SI Ahmed (psychanalyste, spécialisée dans la respiration holotropique), Isabelle Celestin-Lhopiteau (psychothérapeute) et Edouard Collot (psychothérapeute), tous trois spécialistes de l’hypnose et des phénomènes de transe.
L’enjeu de cette table ronde n’est pas d’aborder l’existence ou non d’un espace supra sensible auquel certaines personnes pourraient avoir accès, telles que les chamanes, les médiums ou ceux que notre société qualifie d’"hallucinés", mais plutôt d’aborder cette question sous la forme thérapeutique: quelles solutions permettent à ces gens là d’accepter leur particularité ? Comment un sujet peut-il se reconnecter?
Devrait-on les laisser exprimer "leur folie", par exemple au contact de la nature ou des animaux ? Ou devons-nous les gaver de médicaments en les cloîtrant dans un lieu clos et aseptisé ?
Derrière la question de la thérapie de la mal-a dit, apparait une remise en cause beaucoup plus générale de notre société : les neurosciences et l’anthropologie sont actuellement en train de réhabiliter les Connaissances de nos anciens, à savoir tout l’héritage du monde dit "primitif", et de la pensée magique.
Depuis le haut moyen-âge en effet, sous l’influence d’hommes se gargarisant de "progrès", de "lumières" etc (autant de qualificatifs bien présomptueux au regard du malaise du monde actuel) nous nous sommes coupés de nos racines : la terre "mère". Un espace à "redécouvrir", en quelque sorte, et non à "reconquérir". Bernard de Clairvaux n’écrivait-il pas déjà en 1138 à l’abbé de Vauclair "Crois-en mon expérience : tu trouveras quelque chose de plus dans les bois que dans les livres.
Les arbres et les roches t’enseigneront ce que tu ne peux apprendre d’aucun maître "….
Pourquoi nous sommes-nous fermés à ces sages conseils qui ont traversé les âges ?
Eléments de réponse dans cette table ronde de 55 minutes, filmée au Forum 104.