Jung et la Gnose

La Gnose est une mystique qui renvoie à une Connaissance, transcendante et universelle. A l’instar de l’injonction, devenue célèbre, du temple d’Apollon (Delphes, VIème siècle av. J.-C.), « Homme, connais-toi toi-même et tu découvriras l’univers et les Dieux », la Gnose nous invite à plonger au plus profond de nous, amorcer un dialogue intérieur avec le tréfonds de notre âme, et par ce processus de descente, entr'apercevoir une étincelle de Dieu. Etincelle préfigurant l’embrasement d’un feu intérieur, ardent et durable, nourri par cette Connaissance.

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Cette Gnose, dont la proximité avec les cultes à mystères antiques (Eleusis, Mithra…) sont évidents tant sur un plan idéologique qu'historique, fut par la suite souvent déconsidérée par le christianisme, voire même, parfois, persécutée. En effet, si cette voie de salut individuel qui privilégie « la connaissance à la foi », « le savoir plutôt que le croire » étanche une soif de liberté, cette liberté prend les traits d’une menace pour tout clergé autoritaire.

« Les gnostiques étaient les premiers psychologues deux mille ans avant que cette science ne voit le jour ».

Carl Gustav Jung (1875-1961) était un médecin de l’âme. Il voua sa vie entière à identifier, soigner, les tourments psychotiques de ses patients. Pourquoi Jung s’est-il donc tant intéressé à la Gnose ? En quoi les mythes et symboles de cette sagesse pouvaient-ils représenter un quelconque intérêt thérapeutique pour ses patients ?

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La réponse est assez simple, « dans le texte », du moins. Si Socrate fit sien l’adage de Delphes afin que ses élèves, par ce dialogue, accouchent du meilleur d’eux-mêmes (la  maïeutique), et que le continuateur de ce dernier, Platon, développa le premier la notion d’archétype, « ces images primitives », « idéelles » et « de tout temps éternelles » : Jung comprit le premier que cette descente au plus profond de Soi laissait s’entrouvrir une brèche chez ses patients et favorisait l’émergence de cette « matière à transformation », propice à l’analyse thérapeutique.

Cette matière à transformation, comparable à la « materia prima » des alchimistes est un terreau psychique sensible, évolutif et où les archétypes, pris cette fois dans le sens de la psychologie des profondeurs, (rappelons que plus deux millénaires se sont entretemps écoulés), devenaient « ces grandes images qui structurent notre inconscient ».

Ces images, que le temps n’altère pas, portaient encore, selon Jung, concrètement, le pouvoir de soigner l’homme du XXème siècle…

Françoise Bonardel, dans son dernier ouvrage « Jung et la Gnose » (Pierre Guillaume de Roux Ed.), revient sur la complicité amoureuse que Jung entretint avec la Gnose. Comment, grâce à cette Connaissance éternelle, et par la fulgurance de son intuition (précisons que Jung écrivit ses textes trente années avant les découvertes de Qumrân et de Nag Hammadi), il comprit que ces grandes images archétypiques, véhiculées depuis l'aube des temps par les gnostiques, permettaient à l’homme de recouvrer du Sens dans ce monde désorienté…

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