Sur la place de la femme au sein de la franc-maçonnerie
Les intervenants sont Denise Oberlin, passée grande maîtresse de la Grande Loge féminine de France, Bruno Pinchard, président de la Loge Nationale de Recherche Villard de Honnecourt (Grande Loge nationale française) et Jean-Pierre Bacot, journaliste et éditeur spécialisé dans l’étude des sociétés fraternelles, fondateur de la revue Critica Masonica. Discussion animée par Jean Solis.
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L’initiation féminine est un sujet délicat dans sa définition même.
Car que faut-il déjà comprendre dans l’association de ces deux mots ?
L’initiation, dans la définition moderne du terme, désigne entre autres une cérémonie ou un ensemble de procédés cérémoniels comprenant une approche des Mystères, des épreuves à surmonter, un engagement solennel et l’acquisition de connaissances réservées.
Or le mot lui-même d’ "initiation" n’est employé dans ce sens que depuis à peine deux siècles. Sur un plan purement maçonnique, le mot qui prévaut avant cette époque est "réception". Faut-il voir là le fait que la franc-maçonnerie n’a acquis que fort tard son caractère initiatique, justement ?
Pour ce qui concerne les procédés analogues, "initiatiques", au sein de sociétés ou d’Ordres constitués, nous devons remonter aux écoles de Mystères antiques. On s’aperçoit bien vite que ces cénacles adoptaient la misogynie en usage dans la société civile (ou la civilisation) où elles s’enracinaient...
Ainsi les vestales de la religion romaine, par exemple, dont le rôle est liée au caractère sacré de la virginité féminine, ou la proximité de certaines reines d’Egypte avec les cultes officiels ou secrets, ne constituent que des exceptions, encore qu’elles restent discutables.
L’Antiquité, le Moyen Age et les siècles qui ont suivi jusqu’au tardif XIXe siècle, s’étant appliqués sur le continent eurasiatique à exclure autant que possible les femmes des pouvoirs politique et religieux, cette exclusion constitua, de même, la règle pour les sociétés fraternelles ou à Mystères.
C’est dans un temps d’avènement situé entre 1875 et la Seconde Guerre mondiale que des femmes, sur un fond de revendication citoyenne, passent au premier plan de la scène spirituelle : Helena Blavatsky et Annie Besant en érigeant la Société théosophique. Maria Deraisme en obtenant une initiation maçonnique dans une loge "régulière" d’hommes.
Cette dernière fondera par la suite le Droit Humain, qui reste encore aujourd’hui la plus grande organisation maçonnique mixte dans le monde.
Enfin les loges d’adoption de la Grande Loge de France qui composeront finalement la Grande Loge féminine de France.
Pour autant, la place des femmes dans les sociétés fraternelles modernes est elle un acquis indiscuté ?
La place des femmes dans la franc-maçonnerie aujourd’hui exclut-elle toute controverse ?
Les arguments traditionalistes sur l’ontologie de la femme/mère initiée par nature sont-ils devenus obsolètes dans un consensus contemporain ?
Rien n’est moins sûr….